Cheval

1978 Mort du petit cheval

Photo boucherie hippophagique

 " Ils ne mourraient pas tous mais tous étaient frappés.

 

Le 23 juillet 1976, le législateur lui-même avait tenu à faire disparaître le «cheval de trait» désormais dénommé «cheval lourd». Et il ne s'agissait pas seulement d'une afféterie terminologique: le cheval de trait était destiné à la traction, le cheval lourd à l'abattoir.

 

Il avait bien fallu trouver des débouchés aux éleveurs surpris par l'invasion rapide des tracteurs, leur laisser le temps de s'adapter. De 1956 à 1963, les abattages avaient ainsi grimpé de 30%. Des boucheries chevalines, plus couramment dénommées à leur origine boucheries hippophagiques, s'étaient ouvertes en nombre.

 

Cependant, le faible engouement pour cette viande conduit rapidement à diminuer les élevages. Les abattages qui ont culminé à 110 000 en 1966 retombent à 45 000 environ en 1978 (ils ne dépasseront plus 15 000 à partir de 1990). Dans la période 1975-1979, la consommation de cheval atteint 1,8 kg par habitant (elle ne sera plus que de 0,34 kg en 2005-2009).

 

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Dans le que sais-je consacré au cheval édité en 1981, Jacques Gendry mentionne les effectifs de chevaux depuis 1866. J'ai rapporté ces valeurs à la population française à quelques-unes des dates:

 

  • 3 213 000 en 1866 soit un cheval pour 12,38 habitants,

  • 2 257 000 en 1945 soit un cheval pour 17,57 habitants,

  • 1 071 000 en 1966 soit un cheval pour 45,8 habitants,

  • 739 000 en 1970 soit un cheval pour 68,37 habitants,

  • 417 000 en 1978 soit un cheval pour 127,8 habitants.

 

Mieux qu'un long discours, ces valeurs rendent compte de cette quasi «désertification équine». Alors que la survenance du chemin de fer et de l'automobile – de diffusion limitée il est vrai – n'avaient entraîné en huit décennies qu'une baisse de l'ordre de 30% de l'effectif, celui-ci a été divisé par 5 en 33 ans.

 

Sans surprise, de 1955 à 1975, le nombre de tracteurs est passé de 305 000 à

1 337 000 tandis que le nombre d'exploitations chutait de 39%, les petites exploitations de moins de 20 hectares étant de très loin les plus touchées.

Le remembrement des terres agricoles (parcelles plus grandes, suppression des haies ...) a contribué à la pénétration des tracteurs et, corrélativement, au développement de matériels agricoles de plus en plus volumineux, reportage FR3 Rennes sur ce sujet le 3 6 1976, 12 minutes 50 

 

Amélioration de la productivité aidant, à la pénurie alimentaire de l'après-guerre succède la période des excédents dès 1972.

 

Mes souvenirs de ces années autour de 1978 sont associés à des personnes âgées, ici un cheval de trait qui termine ses jours dans l'écurie de petits agriculteurs et dont seule la tête émerge d'une porte en deux parties superposées, la partie basse interdisant une éventuelle échappée. Là une carriole qu'un retraité conduit debout et dont le passage est annoncé par le choc évocateur des sabots (on s'approche pour le voir passer et l'on écoute sa musique jusqu'à ce qu'elle s'estompe).

 

 

En 2017, l'effectif serait remonté à 1 100 000 (soit un cheval pour 58,9 habitants).

 

Vraisemblablement l'effet d'une certaine démocratisation de l'équitation et de l'utilisation des chevaux pour des attelages de loisirs (calèches des circuits de visites et, d'autre part, roulottes sans grand rapport avec les originaux lépreux de mon enfance). "

 

Chronique publiée en avril 2017

Textes entre guillemets extraits de l'Abécédaire d'un baby-boomer

 

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