Gardien de phare

2012 Zéro

Phare de Cordouan
Phare de Cordouan

"Dans les années soixante-dix, des dizaines de phares étaient gardiennés; en 2000, il n’en restait plus que cinq .

Les gardiens du phare de Cordouan, huit kilomètres face à Royan à l’entrée de l’estuaire de la Gironde, étaient en sursis depuis 1981, quand la désaffectation du bâtiment avait été envisagée en raison de coûts d’entretien jugés trop élevés par l’Etat. Un mouvement de protestation s’était constitué pour s’opposer à l’abandon du phare le plus ancien de France, celui que Henri IV avait voulu « le plus beau phare d’Europe » et que l’on avait, plus tard, surnommé le « Versailles de la mer ».

Visité par les touristes, le phare de Cordouan était aussi un témoignage de l’histoire des feux de mer."

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"Cependant, dans les années quatre-vingt-dix, les gardiens de phares avaient perdu leur raison d’être dès lors que le contrôle du feu avait pu être réalisé à distance. De plus, les contraintes d’alimentation de ce feu pouvaient depuis longtemps déjà être réduites par le recours à des énergies disponibles localement qu’il s’agisse de la houle (dès 1939), des éoliennes (à partir de 1955) ou des panneaux photovoltaïques dans les années quatre-vingts.

L’élément le plus décisif restait à venir : les phares eux-mêmes n’étaient plus indispensables depuis que la plus modeste embarcation pouvait être dotée pour un coût abordable d’équipements lui permettant de connaître en permanence et avec précision sa position, ce même par un brouillard à couper au couteau (le GPS) et d’estimer la distance la séparant du fond de la mer (le sonar)."

" ... on peine à trouver la raison pour laquelle le phare de Cordouan a remplacé aussi tardivement ses gardiens par des guides touristiques. L’administration a t’elle préféré attendre l’âge de leur retraite plutôt que d’investir dans un recyclage difficile à amortir ? Les nombreux reportages réalisés à l’occasion de la cérémonie de départ le 29 juin 2012 ne répondent pas à cette question."

"A l’examen, une autre source d’étonnement tient à la place accordée aux femmes dans l’exercice du métier de gardien de phare. Si la carrière leur était ouverte quand il s’agissait de gérer ponctuellement un phare situé sur la terre ferme, jusqu’au début des années quatre-vingts elles n’avaient pas accès à la formation spécifique qui leur aurait permis de postuler à une nomination en mer."

Roches Douvres
Roches Douvres

"Le plus atterrant, si j’ose dire, est révélé par le cas de cette jeune femme qui, déjà dotée de deux CAP et d’un BEP en mécanique et ayant de surcroit passé avec succès l’examen en 1982, se vit refuser une affectation au phare le plus éloigné des côtes européennes (le phare de Roches-Douvres)

Sept Iles
Sept Iles

pour être envoyée certes loin du littoral … mais à Aurillac, localité plus connue pour la froideur de son climat montagneux que pour la violence de ses flots. Ce n’est qu’en 1995, après bien des tribulations qu’elle obtint de rejoindre le phare des Sept-Iles (Ile aux moines). "

"Mais l’histoire ne devait pas s’arrêter là puisque cette nomination donna lieu à une pétition des épouses des derniers gardiens de phares encore en fonctions, lesquelles étaient soucieuses d’un risque d’une nouvelle nature …"

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"doit-on vraiment regretter la disparition d’un métier qui condamnait des hommes honnêtes et courageux à une relégation périodique et à un certain désoeuvrement ?"

"Quant aux phares, doit-on s’alarmer de leur possible disparition ?

Sans aucun doute si l’on a en tête les plus emblématiques (ceux que l’on évoque toujours pour cultiver la nostalgie, au premier rang desquels Cordouan) ainsi que ceux qui conservent une certaine utilité en complément des moyens modernes de positionnement.

En revanche, le délaissement d’édifices dont la vocation s’est éteinte et dont la valeur architecturale ne justifie pas la conservation - coûteuse – pour les générations futures ne me semble pas être une issue à redouter."

 

"Le paysage aurait même parfois tout à gagner à se dispenser de leur présence disgracieuse et saugrenue. Les châteaux d’eau, qui n’ont rien à leur envier, conservent au moins une justification … "

Textes entre guillemets extraits de l'Abécédaire d'un baby-boomer

 

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