Kir

1951 Vin d'appellation baptisée

"Le chanoine Kir acquiert sa célébrité dans les années quarante mais c’est un homme issu du 19ème siècle qui a presque trente ans en 1905 quand est promulguée la loi de séparation des Eglises et de l’Etat contre laquelle il s’insurge. Agissant en tant que Député et Maire de Dijon jusqu’à sa disparition en 1968, il est un des hommes politiques les plus fameux durant la période qui s’écoule de mon enfance à mes premières années d’adulte."

Chanoine Kir
Le chanoine Kir en soutane à la tribune de l'Assemblée Nationale

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"Dans les textes que je consulte et sur les images des actualités cinématographiques que je visionne, je retrouve bien cette apparente volonté de se démarquer, de se faire remarquer. Mais j’apprends aussi que l’homme doit ses titres de maire et de député au courage et à l’engagement dont il a fait preuve durant la guerre en s’opposant aux occupants et à leurs collaborateurs de la milice."

 

Interview en 1962 pour le journal télévisé (3 minutes) 

 

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"Affilié au Centre National des Indépendants, parti bien campé à droite de l’échiquier politique, il accueillera Nikita Khrouchtchev à Dijon et créera un jumelage avec Stalingrad. Il appellera à voter Mitterrand en 1965 et devra aux communistes sa réélection à un poste de maire que convoitait Robert Poujade, gaulliste, lequel ne lui succédera qu’à son décès.

On peut en déduire qu’il avait pris au pied de la lettre le qualificatif « indépendant » de son parti … "

Bouteille de Kir

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"C’est ce personnage atypique, un peu foutraque, « un clown » assène même son contemporain Guy Thibaut, qui le 20 novembre 1951 communique, sur papier à en-tête de l’Assemblée Nationale, sa décision de « donner en exclusivité à la maison Lejay-Lagoute le droit d’utiliser son nom pour une réclame de cassis dans la forme qui lui plait et notamment pour désigner un vin blanc-cassis ». "

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"A quoi peut donc tenir le succès rapide de cette appellation pour un produit somme toute banal ?

Sans doute doit-on créditer la firme consacrée d’avoir réalisé un produit digne de la réputation du chanoine.

On doit aussi prendre en compte le fait que le nom du chanoine, court, facile à retenir et à prononcer, a tous les attributs susceptibles de lui assurer une audience large, comme Mir (la lessive) et Kub (le bouillon).

Cependant, l’élément déterminant, selon moi, de cette percée rapide tient au respect qu’une part importante de la population accorde alors à un clergé disposant de relais nombreux dans le tissu social du pays. Pour beaucoup, la parole d’un représentant de Dieu sur terre est parole d’Evangile et, même si cette parole concerne bien autre chose que le domaine liturgique, elle pèse plus lourd que toute « réclame » dans le quotidien régional ou sur les ondes de Radio-Luxembourg."

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Sur l’autre bord, du côté des communistes, le kir est doté des vertus d’un contrefeu au Coca-Cola importé par des Américains qu’ils honnissent.

A ces conditions prescriptives optimales s’ajoute un réseau de distribution particulièrement bien pourvu.

Ainsi, à Rémalard, dans l’Orne, où nous passons des vacances, lors d’une promenade avec mon père, nous dénombrons les débits de boissons. Certains s’affirment d’emblée bars ou cafés, d’autres, plus discrets, associent leurs enseignes à des restaurants, des hôtels voire des épiceries. Au total, nous identifions plus de vingt commerces vivant peu ou prou du négoce de l’alcool, soit approximativement un café pour cinquante habitants …"

"La naissance du kir, où plutôt le baptême du vin blanc-cassis sous ce nom, est donc fortement marquée par cette époque durant laquelle le parvis de l’église (où il est bon d’être vu) et les cafés (où l’incognito est préservé par des rideaux opaques) sont encore des lieux de rencontre fréquentés.

 

Aujourd’hui, les protagonistes de ces lieux se sont raréfiés :

• De l’ordre de 10 fois moins d’ordinations de prêtres (1000 par an dans les années cinquante, moins de 100 depuis 1974), décroissance d’ailleurs comparable à celle des vocations communistes,

• De l’ordre de 6 fois moins de cafés (200 000 en 1960, 35000 en 2011). "

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"Des œuvres du chanoine, il demeure un lac artificiel à Dijon et l’apéritif favori des réunions des associations soumises à la loi de 1901 ainsi que des « pots d’accueil» dans les campings et clubs de vacances."

Textes entre guillemets extraits de l'Abécédaire d'un baby-boomer

 

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