"Le lavoir du Locheur dans le département du Calvados est vraisemblablement l'un des nombreux édifices construits dans la seconde moitié du 19ème siècle dans un dessein hygiénique. Suite à l'épidémie de choléra de 1849, l’État, par la loi du 3 février 1851 avait en effet encouragé la construction de lavoirs et dégagé un crédit à cet effet.

Ce lavoir n'a rien de particulièrement remarquable: il est très partiellement couvert, c'est-à-dire que les femmes ne sont abritées que si la pluie n'est pas poussée par le vent."

"La surface de l'eau n'est pas à hauteur des mains: pour l'atteindre, il faut être agenouillé et se courber fortement. Si l'on ajoute à cela la nécessité d'effectuer des rotations du tronc pour se saisir des pièces de toile et les replacer de l'autre côté après rinçage, on peut énoncer que les contraintes posturales auxquelles sont soumises ces lessiveuses sont extrêmes.

Rien de très original à dire sur les ustensiles si ce ne sont ces «boîtes à laver» ouvertes sur deux de leurs côtés et garnies au fond d'un coussin pour protéger les genoux du contact direct avec la pierre et le reste du corps des projections d'eau."

"J'ai connu ce lavoir au début des années cinquante. Mon jeune âge autorisait ma présence en dépit de mon sexe. Mes souvenirs lointains sont surtout auditifs: celui du linge martyrisé par les brosses en chiendent qui grattent affreusement et par les battoirs qui claquent à coups vifs et répétés, celui des lessiveuses qui contribuent au brouhaha en s’époumonant."

"A lire la légende figurant sur la carte postale illustrant le lavoir de Cambremer, «Coups de battoirs et coups de langues», on pourrait être tenté d'en déduire que cette propension cancanière est propre aux lavoirs du Calvados. Il n'en est rien. Pierre Jakez-Hélias écrit ceci à propos du lavoir de Pouldreuzic dans le Finistère: «Le lavoir est le domaine réservé des femmes. Jamais un homme n'oserait s'y montrer de peur d'y entendre ses quatre vérités ou, du moins, d'alimenter la langue des commères derrière son dos».

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"Je n'aurai garde d'omettre «Les lavandières du Portugal» un film qui sortira en 1957. On notera ici l'utilisation du terme de lavandière, bien plus gratifiant et exotique que celui de lessiveuse. Il ne s'agit en rien d'un documentaire à vocation ethnologique: l'intrigue de cette comédie sentimentale repose sur la recherche de la lavandière idéale c'est-à-dire jeune,accorte et belle (pas nécessairement apte à faire correctement la lessive) qui servira de support à la campagne publicitaire d'une machine à laver.

Il n'est pas ici question d'illustrer la pénibilité des conditions de travail que j'ai évoquées précédemment, ni le sort des femmes pour qui cette activité constitue un gagne-pain (celles qui «font des lessives pour les autres»)."