Véhicules électriques

1971 A bas bruit

"  J’ai choisi 1971 comme année de cette étape qui couvre en fait toute la seconde moitié du 20ème siècle et le titre «à bas bruit» pour les deux sens de la formule:

  • au sens propre, pour la faiblesse des décibels émis par les moteurs électriques,
  • au sens figuré, pour le peu d’éclat des progrès réalisés dans la diffusion de cette motorisation.

L’année 1971 est la seule année qui échappe partiellement à cette définition puisqu’elle correspond à la première expérimentation d’un véhicule électrique … sur le sol de la Lune avec Apollo 15.

Encore le retentissement de cet évènement a été loin d’atteindre celui de la déclaration de Neil Armstrong deux ans auparavant « C’est un petit pas pour l’homme, un grand pas pour l’humanité », qui ne s’était éloigné de la navette que de quelques dizaines de mètres tandis que le «véhicule itinérant lunaire»(LRV) permit à ses collègues de faire un périple de vingt-huit kilomètres, périple source d’observations, de photos et de relevés incomparablement plus riches ... et opération réitérée deux fois avec le même succès (Apollo 16 et Apollo 17).

1971-2021 : Il y a cinquante ans, l’homme roulait sur la Lune! , Lignesauto, non daté, texte et illustrations

 

Développé par la NASA, il détient - au moins et sans doute pour longtemps - trois records remarquables:

  • son coût pour parvenir au premier modèle: 40 millions de dollars,
  • sa vitesse volontairement maximale pour se mouvoir sur le sol accidenté de la Lune sans se désintégrer et sans éjecter ses passagers: 10 kms à l’heure,
  • son poids qui n’atteint sur la Terre que 210 kgs et tombe à 35 kgs sur la Lune du fait de l’absence de gravité.

On a roulé sur la Lune !, Dunodvideos, 24 09 2018, 2 minutes 30

Mais revenons sur terre avec mon souvenir d’enfant durant. les années cinquante quand, dans le 5ème arrondissement de Paris, des camions électriques étaient utilisés pour le ramassage des ordures. Leur discrétion sonore étonnante contrastait violemment avec le puissant tintamarre des poubelles métalliques que les concierges transbahutaient sur les larges trottoirs (pas encore accaparées par les voitures en stationnement) du boulevard Haussmannien.

Camion SOVEL
Camion SOVEL

Il faut ici rappeler que ces poubelles métalliques, comme les valises d’alors, étaient dépourvues de roulettes … et que, pour les déplacer, il fallait être deux (quand les maris des concierges avaient leur propres emplois).

Ces camions provenaient vraisemblablement des usines SOVEL de Villeurbanne et ils partageaient leur tâche à Paris avec d’autres camions thermiques.

Histoire du camion Sovel !, RMC Vintage Mecanic, 1 minute 10

Si je suis formel quant à la présence de ces camions, je n’ai pas pu déterminer à quelle date ils avaient été déployés à Paris. Trois hypothèses sont possibles:

  •  dès la construction des usines SOVEL en 1925 comme semblent le démontrer les photographies du site passion-métrique,

Sovel, Les forums de passion métrique, non daté, texte et illustrations

  • durant l’occupation comme cela semble le plus logique du fait de la pénurie de carburant dont résultait l’activité fortement accrue de SOVEL?
  • dans les années cinquante pour ne pas ajouter à la pollution du charbon (cf. les milliers de morts du fait du "fog" londonien en 1952) et de la proximité de la rive gauche par rapport au centre d’incinération des déchets d'Ivry sur Seine limitrophe?.

Toujours est-il que ces camions devaient être progressivement remplacés à Paris par des modèles thermiques, moins coûteux à l’achat et plus performants face à l’accroissement des volumes de déchets.

CGE-Grégoire
CGE-Grégoire

En ce qui concerne les automobiles, l’intérêt pour la traction électrique des industriels et des pouvoirs publics ne s’est pas estompé,renforcé même avec le renchérissement du pétrole dans les années soixante-dix.

Néanmoins, il n’a jamais débouché sur une production durable et significative. Il s’est agi le plus souvent de la mise au point de prototypes comme la CGE-Grégoire, prototypes dont Jean-Albert Grégoire fournit des illustrations dans son livre.

CGE Grégoire 1971, lautomobileancienne, 01 01 2018, texte et illustration

R5 électrique
R5 électrique

Les grands constructeurs français s’y sont également essayés pour réaliser des véhicules essentiellement destinés à des flottes d’entreprises et à des administrations publiques: Renault en collaboration avec l’EDF avec ses R4 et R5 à partir de1972, toutes deux produites chacune à environ 300 exemplaires,

La première Renault 4 électrique !, Archives INA, 1972, 2 minutes 20

En avance sur son temps | Renault 5 électrique, pub Renault,  23 07 2022, 30 secondes

AX électrique avec sa trappe carburant ... pour le chauffage
AX électrique avec sa trappe carburant ... pour le chauffage

 

En 1995, Citroën, après quelques essais de traction électrique sur des véhicules utilitaires à La Rochelle, présente à son tour une version électrique de sa petite citadine, l’AX.

Ses caractéristiques techniques ne sont guère plus évoluées que celles de la devancière (le record de la « jamais contente » n’est toujours pas égalé …). Elle se reconnaît par sa prise électrique sur l’aile avant droite mais se distingue par sa trappe à essence sur l’aile arrière droite pour alimenter le moteur du chauffage qui, détail cocasse, n’a pas eu droit à l’électricité....

Citroên fabriquera ensuite la Saxo électrique tandis que Peugeot proposera la 106 électrique (produite à 2270 exemplaires de 1996 à 1999.

En compulsant les données disponibles, on peut constater combien l’offre aux particuliers de ces véhicules était peu attractive. Par exemple pour la 106 électrique:

  • prix de vente exorbitant: 91900 francs, 50% plus élevé que le modèle essence auquel il fallait ajouter l'équipement d'un système de gestion des batteries pour la recharge,
  • recharge en dehors du domicile très difficile du fait du nombre extrêmement restreint de bornes publiques,
  • performances médiocres (90 kms/heure maxi),
  • réseau peu préparé à la prise en charge de la solution électrique et donc peu enclin à en assurer la promotion,
  • autonomie ultra-limitée (80 kms maxi).  "

Peugeot 106 Electrique : trop tôt pour séduire !,  CarJager, 21 11 2015, texte et illustrations

Ecorché de Peugeot 106 électrique
Ecorché de Peugeot 106 électrique

Le 20ème siècle s’achève avec l’émergence au Japon de voitures hybrides qui utilisent les progrès de l’informatique embarquée pour gérer de manière autonome l’utilisation à bon escient de l’énergie électrique pour optimiser le recours à l’énergie thermique :

  • en 1997, les Toyota Prius (1ère génération) et RAV4 EV,
  • en 1999, la Honda Insight.

La Toyota Prius qui ne sera commercialisée en France qu’en 2000 (et promise à une plus grande diffusion à partir de la génération 2) a marqué l’histoire des véhicules hybrides que nous connaissons aujourd’hui. Équipée d’une batterie nickel-métal hydrure ne permettant qu’une autonomie d’environ 2kms, elle ne vise manifestement pas à constituer une possible alternative à la solution thermique mais seulement – et c’est déjà fort appréciable – à réduire significativement la consommation de carburant (et donc d’émissions de CO2) par rapport à des véhicules fonctionnellement comparables, notamment en nombre de places offertes.

Toyota Prius 1 : ancêtre des hybrides, L'argus, 12 03 2024, texte et illustrations

La Honda Insight est également la première (des électriques et des hybrides) à adopter une batterie lithium ion, une technologie qui permettra d’élever sensiblement le niveau d’autonomie tout en réduisant les contraintes de poids, d’encombrement et de recharge, une technologie aussi qui mettra du temps à se diffuser et qui demeurera encore aujourd'hui une technologie à risque d’incendie faible mais gravissime.

 

Ceci est une autre histoire que nous examinerons lors de la prochaine parution.

 

 

 

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Chronique publiée le 1 mai 2024

Textes entre guillemets extraits de l'Abécédaire d'un baby-boomer

 

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