Ordures ménagères

Poubelles en attente lors des grèves de 1968
Poubelles en attente lors des grèves de 1968

"  Le titre que j'ai choisi appelle quelques explications. Le champ de cette chronique est limité à la «production des ménages», production en rapport plus ou moins direct avec la «consommation des ménages», concept utilisé en économie. Cela implique que le domaine couvert n'est pas restreint aux épluchures et papiers gras mais inclut également des rebuts domestiques de nature industrielle, rebuts qui peuvent être dangereux et hautement polluants (batteries, piles …).

 

Second choix délibérément opéré pour ce titre, celui du mot ordure et non du mot déchet par refus de succomber à la vague euphémisante qui s'est amplifiée à partir des années soixante-dix. Dans mon enfance, il ne serait en effet venu à personne l'idée d'utiliser le mot déchet pour qualifier tout ce qui trouvait place dans le seau à ordures avant de rejoindre la benne à ordures. Les éboueurs étaient même parfois qualifiés de boueux, expression venant du temps où il s'agissait pour eux d'éloigner les boues urbaines du cœur des cités. Place aujourd'hui aux agents de propreté urbaine, mieux encore aux agents de la salubrité publique, voire aux ripeurs, francisation approximative et sibylline pour beaucoup du terme «ripper», synonyme outre-Manche de «garbage collector».

 

Ramassage des ordures à Paris &nnées 40

Le contenu et la quantité d'ordures ménagères ont évolué durant les sept décennies écoulées du fait:

  • de l'accroissement de la population passée de l'ordre de 40 millions au sortir de la guerre à 65 millions en 2018,

  • de l'élévation du niveau de vie particulièrement sensible durant les trente glorieuses à la source d'une augmentation de la « consommation des ménages»,

  • de l'apparition en nombre de produits délibérément jetables (sujet abordé dans une autre chronique).

 Dans cette chronique, j'ai distingué quatre étapes:

  • 1956: à la campagne, le traitement des ordures est le plus souvent limité à un ramassage suivi d'un dépôt à même le sol dans un endroit à l'écart des habitations. Dans les villes, l'incinération est considérée comme la solution. Dans mon quartier parisien, le cinquième arrondissement, un palier est franchi: la chaleur produite par l'incinération à Ivry est utilisée pour assurer un chauffage urbain de milliers de logements.

  • 1975: un texte fondateur en matière de traitement des ordures ménagères proscrit les dépôts d'ordures sauvages et communaux. Il sera suivi de beaucoup d'autres, notamment en 1992. Mais l'application restera constamment à la traîne.

  • 1989: l'institutionnalisation des déchetteries répond au besoin de traitement des rebuts de nature industrielle et confère aux citoyens un rôle actif dans le tri.

  • 2009: on s'avise que le meilleur moyen de limiter les ordures consiste à les réduire à la source notamment en limitant les emballages et en concevant des produits optimisant la réutilisation en fin de vie.

 

Ces dates ne constituent que des jalons parmi d'autres choisis par les auteurs des nombreux ouvrages consacrés à ce sujet.

 

De plus, l'évolution des pratiques dans ce domaine ne se déroule pas selon un cadencement commun et harmonieux en France et, a fortiori, en Europe, un des plus flagrants décalages s'observant à Naples, objet d'une chronique spécifique.  "

 

Pour l'écriture de cette chronique, j'ai consulté les ouvrages suivants :

  • La gestion des déchets, Philippe Pichat, Flammarion 1995
  • Homo detritus, Baptiste Monsaingeon, Seuil 2017
  • Le Jardin des Plantes, Stéphane Deligeorges, Alexandre Gady, Françoise Labalette, Editions du patrimoine 2004
  • La vie secrète du quartier latin, Philippe Mellot, Omnibus 2009
  • Histoire des hommes et de leurs ordures, Catherine de Silguy, Le cherche midi 2009
  • Le mouvement social, Barbara Prost, Editions de l'Atelier 2007
  • Aide-mémoire gestion des déchets, Jean-Michel Balet, Dunod 2005
  • Les métamorphoses du déchet, Martine Tabeaud et Grégory Hamez, Publications de la Sorbonne, 2000
  • Les déchets du big bang à nos jours, Christian Duquennoi, Editions QUAE 2015
  • La ruée vers l'ordure, Jérémie Cavé, PUF 2015

 

Textes entre guillemets extraits de l'Abécédaire d'un baby-boomer

 

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